Le disque vinyle est en pleine bourre, ce n’est pas ici qu’on va s’en plaindre. Pénurie de presses, usines aux abois, disquaires en panique, consommateurs errant de rayons vides en sites internet spécialisés : tout le monde en réclame !
La postérité sur 31,5 cm2
Parmi les arguments de cet improbable retour en grâce, en voici un de taille : la pochette. Sur 31,5 cm2, l’artiste a en effet tout loisir d’exprimer son univers, souvent magnifié par la créativité d’un peintre, d’un photographe ou d’un graphiste appelé en renfort. De Sticky Fingers à Dark Side Of The Moon en passant par Sergent Pepper, certaines de ces créations sont littéralement passées à la postérité, faisant entrer l’art dans des millions de foyers. C’est sûr que le CD ne peut pas en dire autant.
Big Bang mon cul
Dans ces conditions, comment peut-on, en 2016, nous proposer des pochettes aussi moches que le Blackstar de David Bowie ou le Is The Is Are de DIIV ? Pour le premier, qui nous a pourtant habitué à plus d’exigence (voir l’historique de ses pochettes par le NME), le fautif – le designer Jonathan Barnbrook, déjà responsable de la fumisterie The Next Day en 2013 – a dû se fendre d’une justification a posteriori pour le moins capillo-tractée : “L’idée de mortalité est là, et bien sûr l’idée d’un trou noir absorbant tout, le Big Bang, le début de l’univers, s’il y a une fin à l’univers”. Et si Bowie n’était pas mort, il aurait raconté quoi, Jonathan ? Que c’était un clin d’oeil à Star Wars ?
2ème année de maternelle
Dans le cas du second, DIIV alias Zachary Cole Smith, catapulté nouvelle coqueluche indé avec des vrais morceaux de Brooklyn et d’héroïne dedans, figurez-vous qu’on ne doit pas la pochette à son petit neveu actuellement en 2ème année de maternelle, mais bien à 3 artistes différents qui ont compilé leur talent pour nous vomir ce dégueulis . Alors là franchement, je dis chapeau.
La recette d’une pochette réussie
C’est quoi une pochette réussie ? A mon humble avis, c’est une pochette qui colle parfaitement avec la musique qu’elle contient, mais qui peut aussi exister sans elle. C’est une création graphique au service de la musique, l’inverse n’étant tout simplement pas possible. Alors oui on veut une photo de Bowie, pour compléter l’album photo discographique dans lequel on le voit vieillir avec bienveillance. Oui on veut de la créativité, de la folie, de l’humour, du risque, de la pertinence, pas du graphisme pompeux manquant terriblement d’inspiration ! Oui on veut que les artistes prennent ce sujet au sérieux, ou alors ce n’est pas la peine de sortir leur disque en vinyle.
Et si finalement, pour déterminer si une pochette est réussie, il suffisait de se poser une seule question : est-ce que vous la mettriez au mur ?